Présence militaire française au Bénin: Patrice Talon, le mauvais stratège ou la déception de tout un continent ?

Alors que plusieurs peuples du continent africain, y compris la population béninoise, ne sont pas partisans de la présence de base ou de militaires français sur leur sol, le gouvernement béninois ne résiste pas à la tentation de l’offre d’Emmanuel Macron. Ce n’est plus une rumeur, les forces françaises sont au Bénin et pourraient bien y rester. Ce deal est un mauvais choix stratégique du président béninois dans son élan de lutte contre le terrorisme.

Après l’échec cuisant de la France à aider le Mali, le Burkina Faso et Niger dans la lutte contre le terrorisme et le renvoie des forces des opérations Barkhane et Sabre respectivement du Mali et du Burkina Faso, Paris a trouvé une nouvelle destination pour ses éléments afin de rester dans la région ou tout près pour mieux contrôler ses intérêts.

C’est le Bénin qui pourrait donc, dans un avenir proche, devenir la prochaine base arrière ouest africaine de l’armée française. En effet, déployées dans le pays sur accord plutôt ambigüe, entre Paris et les autorités béninoises sous la direction de Patrice Talon, les forces françaises sont au Bénin en tant qu’instructeurs militaires. Officiellement, elles sont dans le pays pour former les militaires béninois à lutter efficacement contre les djihadistes.

Selon les informations, une partie du camp militaire de Kandi est désormais occupée par les « instructeurs » militaires français. Selon Macron lors de son passage au Bénin, elles aident également le Bénin dans le renseignement. Cependant, des informations font état de ce que les soldats français sont également au front conjointement avec les forces du Bénin et donc participent aux combats éventuels et aux patrouilles. Macron a semblé le confirmer d’ailleurs, lors de son intervention sur la question de la coopération militaire en conférence de presse à Cotonou.

Tout comme au départ de l’opération Sabre au Burkina Faso, les forces françaises étaient arrivées en toute discrétion et le gouvernement a nié pendant longtemps leur présence avant que cela ne soit évident et qu’il ne l’annonce, le Bénin n’a toujours pas communiqué sur la présence et le rôle effectif de ces éléments d’une armée étrangère sur le territoire béninois. Le président Patrice Talon s’est-il finalement laisser prendre dans le filet de l’Elysée ?

Patrice Talon, la déception ?

Au début de son premier mandat, le président béninois Patrice Talon n’a pas hésité à prendre des décisions impopulaires qui aujourd’hui semblent porter ses fruits et lui donner raison. Il a également eu un certain tempérament plutôt intéressant face aux agissements de certains responsables occidentaux en ce qui concerne les affaires internes du Bénin. Patrice Talon avait été applaudi par plusieurs africains pour ses discours et ses prises de décision qui se rapprochent d’une certaine indépendance tant de la personne que de son pays. Mais que s’est-il passé ?

Alors que tout le monde le félicitait et s’attendait à ce qu’il poursuive sur ce chemin vis-à-vis surtout des relations avec la puissance coloniale, la France, l’homme politique a semblé baisser la garde et pourrait avoir ainsi mis son pays dans de gros problèmes stratégiques. Jusque-là, il n’y avait pas eu de base militaire d’une puissance étrangère au Bénin et cela pourrait changer dans le temps. En effet, tous les pays africains ou presque, où se retrouvent des bases militaires françaises se retrouvent confrontés à un moment ou à un autre à des problèmes de sécurité et/ou de stabilité politique. Certains chefs d’Etat se servent aussi de cette base française comme garanti de protection pour s’accrocher au pouvoir.

Patrice Talon a permis la venue et l’installation de soldats français sur le territoire béninois pour, selon les informations, apprendre aux soldats béninois, comment défendre leur propre terre contre des djihadistes. Comme si en plus d’une décennie au Sahel la France a changé quelque chose dans la région. Les forces françaises n’ont pas été efficaces au Mali, au Niger ou au Burkina Faso, comment peut-il en être autrement avec le Bénin ? Il faut aussi noter que la France n’a jamais gagné véritablement une guerre contre le terrorisme et donc on se demande sur quelle base elle formera les forces béninoises. Notons également qu’avant même les premières attaques djihadistes, les militaires béninois avaient reçu des années de formations de lutte anti-terroriste avec les forces américaine dirigées par l’Africom.

Le mauvais calcul de Talon

S’il est clair que le président Patrice Talon et son gouvernement s’inquiètent pour la sécurité de la population, il est aussi évident que le choix de la France pour aider est un mauvais, voire très mauvais calcul stratégique. En effet, dans l’histoire du monde moderne, les quelques pays qui ont véritablement eu des succès contre le terrorisme sont entre autres, la Mauritanie, l’Algérie, l’Egypte. Certains semblent également s’y  connaitre  comme les Etats-Unis, la Turquie, la Russie dans le cadre de ses opérations en Syrie.

Le choix aurait été légitime et compréhensif si Talon avait fait appel à l’expérience mauritanienne ou algérienne pour aider à mener la vie dure aux terroristes qui sont toujours aux portes du Bénin. Cependant, il n’était pas opportun de courir vers de l’aide alors que le même gouvernement avait laissé entendre que la situation était sous contrôle. Il va sans dire que stratégiquement, le calcul de Talon en acceptant une implantation d’une entité militaire française au Bénin, est erroné et pourrait se retourner contre le pays.

L’autre probabilité du deal

Cependant, il ne faut pas seulement voire les choses sous un angle stratégique. La présence des forces françaises sur le sol béninois pourrait servir d’autres agendas. On sait que l’uranium exploité par la société française Orano au Niger, transite par le Bénin et par voie terrestre. Cette situation pourrait laisser croire que le deal est de continuer cette manœuvre dans laquelle le Bénin récupère quelques « taxes », et que les éléments de l’armée française assurent la sécurité de la marchandise entre les deux frontières.

Dans tous les cas il faut comprendre que les forces françaises dans un pays africain n’ont jamais vraiment fini leur mission initiale. Elles ne sont jamais parties d’elles-mêmes après y avoir été déployées. Soit elles sont renvoyées comme au Mali et au Burkina Faso, soit elles sont forcées de partir parce que poussée par une concurrente plus utile comme en Centrafrique. Quelle sera le cas du Bénin où c’est devenu une sorte d’histoire d’amour entre Patrice Talon et Emmanuel Macron depuis un moment ?

flamboyant
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